Domancy Sallanches 1980



Sur le Stage Montagne Alpes, Chablais - Val d'Arly, les Rouleurs de Mécaniques pourront monter la côte de Domancy. Ascension devenue légendaire grâce à Bernard Hinault qui avait emporté son seul titre de Champion du Monde sur un circuit très difficile à Sallanches.

1980 l’année en dents de scie

En 1980, Bernard Hinault domine le cyclisme mondial : il a déjà gagné 2 Tours de France, un Tour d’Espagne et de multiples autres courses de prestige.

Au printemps, il gagne un Liège-Bastogne-Liège mythique, disputé sous la neige (21 coureurs à l’arrivée seulement), avec une avance incroyable de 9 min sur le 2ème et avec un « souvenir » ramené des Ardennes sous forme d’engelures qui lui resteront à vie. En juin, il ajoute le Tour d’Italie à son palmarès.

Un mois plus tard sur le Tour, il a déjà creusé des écarts importants sur ses principaux rivaux pour la victoire finale mais des douleurs au genou le font abandonner l’épreuve.

A 5 semaines des Championnats du Monde de Sallanches, cela ne laisse rien augurer de bon.

Le compte à rebours est lancé mais à ce niveau-là, on ne se remet pas impunément d’une telle coupure. A sa reprise en course, sur le Tour d’Allemagne, il termine à plus de 16 minutes du vainqueur. Ce n’est que sur le Tour du Limousin, avec une concurrence plus faible, que les 1ères bonnes sensations reviennent. Mais la course ne se déroule qu’à quelques jours des Championnats du Monde. Le temps est compté.

La France s’impatience car, « à la maison » elle ne peut voir d’autre vainqueur qu’un Français, d’autant qu’en cette année 1980 cela fait 18 ans qu’un Français n’a pas été Champion du Monde (avec Jean Stablinski).

Clairement, le parcours été choisi pour mettre en avant les caractéristiques du Champion Breton. C’est de bonne guerre de la part des organisateurs et correspond à une certaine alternance des parcours, entre les précédentes années aux Pays-Bas et Allemagne, et celui-ci taillé pour les grimpeurs-puncheurs comme Bernard Hinault.

La course

Pour autant, sûr de son fait et avec une équipe de France emmené par Jacques Anquetil lui-même en tant que sélectionneur et des équipiers dévoués dont Bernard Thévenet, 2 Tours de France à son actif mais en fin de carrière, Hinault annonce le matin à son staff « c’est OK les gars, vous pouvez mettre le Champagne au frais pour ce soir ».

Le parcours de Sallanches ne développe rien de moins que 268 kilomètres avec surtout la Côte de Domancy à franchir à 20 reprises ! La difficulté n’est donc pas seulement le dénivelé total (4600 m) voisin par exemple des Championnats du Monde d’Innsbruck en 2018 (Alejandro Valverde vainqueur devant Romain Bardet) que la distance à parcourir.

Au final, seuls 15 coureurs franchiront la ligne.

Au briefing le matin, la tactique était claire et Hinault avait dit à ses équipiers : vous vous occupez de la 1ère moitié de la course, je ferai la 2ème.

Résultat ? Au 2ème des 20 tours, qui part en échappée ? Hinault lui-même.

Qui imprimait le rythme pour effectuer l’écrémage ? Hinault lui-même, plutôt que de laisser faire les coéquipiers.

A 100 km de l’arrivée, seuls Baronchelli, Pollentier, Van de Velde, Battaglin, Panizza, Vinsentini et Ruperez étaient encore en compagnie futur Champion du Monde.

Dans la dernière montée, Baronchelli lâchait prise. En 6 km jusqu’à la ligne, son débours allait atteindre 1 minute. Pour se débarrasser de son dernier adversaire, Hinault expliquait à l’arrivée qu’il avait remarquait que Baronchelli se mettait sur son plus petit développement, systématiquement au même endroit à chaque tour de circuit. Les dérailleurs et les changements de vitesse au cadre n’étaient pas aussi perfectionnés qu’aujourd’hui et la manœuvre réclamait quelques longs dixièmes de secondes, pendant lesquels le rendement n’était pas au mieux et la position en danseuse impossible. C’est exactement à ce moment crucial qu’Hinault avait choisi de produire son effort maximal pendant que Baronchelli restait cloué à la pente.

Un autre passage de la côte, en descente cette fois, a fait beaucoup parler. En 2016, sous la pluie, Roman Bardet s’était échappé sur ces virages pentus, serrés et mouillés en compagnie de son coéquipier Michael Chérel. Derrière eux, Vincenzo Nibali et Chris Froome tombaient dans le même virage. Ce dernier cassait son vélo et finissait avec le vélo de Geraint Thomas. Un vélo plus petit et équipé de plateaux ronds alors que Froome utilise habituellement des plateaux Osymetric fortement ovalisés. Cela n’avait pas empêché Froome de terminer l’étape avec les meilleurs même si Bardet n’avait pas été rejoint et l’avait emporté au Bettex.

Caractéristiques de la montée

La montée se développe sur 2,7 km pour un dénivelé de 230 m soit une pente moyenne de 8,6%.

Le passage le plus pentu se situe à mi pente et propose 16% environ mais de longues rampes autour de 13% émaillent l’ascension. Le pied et la fin de la montée sont légèrement moins difficile.

Il n’y a rien d’insurmontable à effectuer cette montée qui représente environ 15 min d’effort mais tout cycliste en général et les Rouleurs de Mécanique en particulier, pourront repenser dans ces pentes à Bernard Hinault et ses 14 collègues cyclistes qui avaient effectué 20 fois la montée !

Par Olivier Dulaurent pour les Rouleurs de Mécaniques